Fils d’une légende vivante, mais avant tout brillant contrebassiste de jazz et compositeur ou arrangeur de musiques de film dont Gran Torino, Mystic river, Million dollar baby, Lettres d’Iwo Jima et Invictus, Kyle Eastwood est l’auteur de huit albums dont le dernier, Cinematic, variationne des thèmes cultes du cinéma. Avec son quintet, Kyle y sublime la ballade de Gran Torino, fait swinguer La Panthère rose et groover le thème de Skyfall.
Après son premier disque en leader, From there to here (1998), ancrant résolument ses références dans l’âge d’or du jazz orchestral des années cinquante, Kyle Eastwood passe l’essentiel des années 2000 à repousser les frontières de son univers musical. Au fil d’albums aussi éclectiques que raffinés, il déploie avec infiniment d’élégance l’éventail de ses goûts musicaux, flirtant tour à tour avec l’électro-jazz cool et sophistiqué, le smooth jazz aux accents seventies et résolument groovy, jusqu’au manifeste arty, chic et urbain, subtilement métissé.
Fort de cette exploration érudite des tendances de la pop music contemporaine, le contrebassiste semble avoir trouvé sa voie, celle d’un retour à un jazz plus direct, lyrique et mélodique. L’album Songs from the Château amorce cette nouvelle phase de sa carrière, qui répond à sa quête d’une relation à la tradition, à la fois réaffirmée et renouvelée. À la tête d’un quintet incandescent composé de jeunes musiciens anglais, en phase avec ses partis-pris musicaux, le contrebassiste y pose les jalons d’une musique mélodieuse et pleine de swing, à la fois simple dans ses formes et raffinée dans son expression.
Les trois disques suivants, The View from here, Timepieces puis In Transit, publiés
entre 2013 et 2017 sur le label Jazz Village, confirment avec brio la nouvelle orientation esthétique du musicien accompagné de sa formation. En 2022, il crée au Festival Lumière à Lyon un spectacle au concept inédit, où il reprend, à la tête de son combo, les partitions emblématiques des films interprétés et / ou mis en scène par son père, Clint Eastwood. Pour Kyle, lui-même comédien à quatorze ans dans Honkytonk man, c’est une façon de boucler la boucle, de saluer les grands compositeurs pour l’image ayant façonné sa vocation, d’Ennio Morricone à John Williams, en passant par Lalo Schifrin. Projetés entre chaque morceau, des échanges entre Kyle et Clint confortent la dimension émotionnelle et intime de ce programme, à la façon d’un passage de relais : le père a transmis au fils sa passion
éperdue pour le jazz, le fils lui témoigne aujourd’hui sa reconnaissance, en l’hommageant par le biais de la musique. En clôture de la 9e édition du Festival de Cinéma et de Musique de La Baule, ce concert exceptionnel Eastwood par Eastwood sera plus qu’un formidable moment de spectacle : un rendez-vous pyrotechnique avec la mémoire musicale du cinéma.